Le 22 novembre 2008, grande journée d’action contre la privatisation de La Poste à l’appel de l’intersyndicale CGT, SUD, CFDT, FO, CFTC, et du comité national pour la mobilisation contre la privatisation (plus de cinquante organisations associatives, politiques et syndicales, dont certaines ont collaboré et collaborent toujours à la mise en place de la privatisation).
Pour la CNT PTT du Rhône, la privatisation de La Poste commence il y a vingt ans, en 1988, avec la mission Prévot, sous le ministre des PTE, Paul Quilés (PS), du gouvernement de Michel Rocard (PS), sous la présidence de François Mitterrand. Un an de consultation des « partenaires sociaux », des usagers et du personnel pour aboutir à la mise en place, le 1er janvier 1991, de la réforme des PTT. Cette réforme, acceptée par les syndicats CFDT, CFTC et FO, consacre la séparation de La Poste et de France Télécom en deux entreprises publiques, industrielles et commerciales (EPIC). Elle amène aussi un bouleversement des règles de gestion du personnel avec, en 1993, la mise en place des grades de fonctionnaires poste, dits de « reclassification ». À la CNT PTT, nous choisirons de garder notre statut de fonctionnaire d’État (reclassé) et, malgré les 400 francs d’à-valoir (la carotte), nous appellerons le personnel à refuser la reclassification. En 2008, quelques centaines de travailleurs continuent encore ce combat avec les amicales de reclassés.
Dés 1991, La Poste embauche des salariés sous contrat privé en CDD, hors de toute règle et en bafouant le droit du travail (CDD illégaux à répétition, jusqu’à 150 pour certains) dans un silence total de la part des personnels fonctionnaires, syndiqués ou non. Les horaires atypiques (0h/6h) ou les temps partiels imposés étaient comblés par des CDD. Au centre de tri de Saint-Priest, nous avons découvert cette exploitation et appris difficilement à lutter contre, en intervenant auprès de la direction ou en saisissant les prud’hommes.
La CNT PTT du Rhône nommera des militants, salariés de droit privé, délégués syndicaux pour leur apporter une protection contre la répression patronale. Les inspecteurs du travail, saisis par des salariés de droit privé ou par quelques syndicalistes dont la CNT PTT, tenteront parfois quelques incursions dans les zones de non-droit postales mais la loi de 2005, dite de régulation postale, les renverra dans leurs bureaux.
En 1993, se met en place l’entretien d’appréciation qui remplace la notation, jusque-là, laissée aux bons soins de nos chefs. Avec l’entretien, c’est la pierre angulaire du management qui se met en place. L’agent, seul face à son chef direct, doit défendre le bilan d’une année de travail. L’entretien est un moment privilégié pour lui faire intégrer les nouvelles valeurs de « l’entreprise Poste » et lui imposer des objectifs pour l’année suivante. SUD, FNSA, CNT feront casser le décret instituant l’entretien devant le Conseil d’État. Mais, il sera de nouveau mis en place par le ministre de tutelle. SUD abandonnera la lutte et sortira même une brochure expliquant comment bien se comporter à l’entretien rejoignant CGT,CFDT, FO, etc. Dans le Rhône, le syndicat CNT appellera le personnel à refuser toute participation à cet entretien. Pendant ce temps, la direction crée des filiales pour contourner les réglementations tarifaires et administratives. Elle supprime ou cède au privé les services annexes, garage, imprimerie, centres de vacances, restaurants administratifs, etc. Elle vend à une banque d’affaires le parc automobile et une loi lui permet de vendre les immeubles et terrains, propriété des citoyens de ce pays. Pour amener plus facilement la privatisation, La Poste est découpée en branches : le courrier (distribution, tri, transport), le grand public (les bureaux de poste), les services financiers (chèques postaux devenus Banque postale), les colis, les services techniques. Cela entraînera dans certains bureaux la construction de mur pour éviter le contact entre facteurs et guichetiers.
En 2005, la loi de régulation postale crée la Banque postale et décrète que la représentation du personnel ne se fera ni par les D.P., ni par le C.E., les délégués syndicaux sont niés. Il restera des mandatés syndicaux sans pouvoir, des élus aux institutions paritaires avec comme seul pouvoir celui de voter contre les décisions que La Poste appliquera quand même. Un accord interne en 2006 signé par CFDT, FO, CFTC, UNSA supprime tout droit d’expression aux syndicats dits « non représentatifs » à l’encontre des textes régissant la fonction publique. Depuis 1991, la direction de La Poste n’a qu’un objectif, l’entrée d’actionnaires privés dans le capital de l’entreprise, donc la privatisation. Depuis 1991, tout a été fait pour que le personnel intègre cette évolution, la seule possible pour lutter contre la concurrence, créée par la dérèglementation postale européenne. Pour cela, une propagande permanente est distillée par les journaux d’entreprise et les cadres et agents de maîtrise (la plupart fonctionnaires), plus connues sous le nom de « La voix de son maître ». Pour lutter contre la privatisation il faut :
Demander la titularisation en fonctionnaire des salariés de droit privé (40% du personnel) et tout de suite l’égalité des salaires (moins 300 euros en CDI) et des droits ;
Supprimer les branches et retour à une seule entité ;
Arrêter la fermeture des bureaux non rentables et maintenir la péréquation des tarifs, gage de l’égalité entre usagers..
Arrêter la mise en place de « facteur d’avenir » qui va tuer le service public postal.
Ces revendications font mal à la direction de La Poste et les militants qui les portent sont en butte à la répression.
À Bordeaux Bègles, poursuite au pénal des quatorze militants CGT, SUD, CNT, déjà mis à pied, mutés disciplinaires ou licenciés comme Fabrice. Tentative d’intimidation policière à l’encontre de Thomas Barba, militant CGT d’Albi, qui aux prud’hommes a obtenu la requalification de nombreux CDD en CDI ainsi que la prise en compte du temps d’habillement. Mise à pied de deux ans, sans salaire, pour Serge Reynaud, facteur militant CNT à Marseille, six mois pour Jean-Claude Blais, facteur militant CGT à Briançon, menace de sanction contre Brigitte Gueugnon, facteur-militante CNT à Saint-Genis Laval CDIS, sans oublier les blâmes et avertissements contre les facteurs qui, comme eux, refusent la mise en place de « facteur d’avenir ».
Ne les laissons pas seuls, refusons la privatisation du service public postal et agissons quotidiennement, personnels et usagers, pour faire reculer l’appétit des financiers.
Fédération PTT CNT