Le gouvernement a plié. C’est rare. Le rapport de forces instauré depuis des années, dans l’unité des composantes, paysans, citoyens, associations, zadistes, comité locaux, syndicalistes, a produit ce qui motive nos luttes : une victoire arrachée aux pouvoirs, État et collectivités au service d’une multinationale du BTP. Aussitôt, le Premier ministre a tendu un piège au mouvement, lui enjoignant de nettoyer la route des chicanes avec un ultimatum à peine voilé et une menace de le faire par la force si cette « normalisation » n’était pas exécutée par les militant.es. Ce qui ne s’est pas fait sans douleur pour une partie des zadistes vivant autour de cette route et qui n’ont pas participé aux assemblées où les composantes ont décidé de donner ce gage de bonne foi à l’État. L’urgence étant d’aborder les négociations pour obtenir le gel de la redistribution des terres, le refus des expulsions à la fin de la trêve hivernale, l’amnistie des militant.es du mouvement qui ont été condamné.es...

Cette réponse immédiate à l’exigence des autorités pour la route des chicanes a laissé dans l’amertume des zadistes parmi les plus précaires. Le mouvement contre l’aéroport et son monde a toujours affirmé que toutes les formes d’occupation avaient jusqu’ici leur place, en déployant un sens inventif de la composition et une attention aux autres. Il faut être vigilant.es maintenant et demain sur des fractures sociales et politiques qui pourraient s’opérer.

Toute lutte porte en elle les risques d’avoir ses gagnants et ses laissé.es pour compte. Comme les salarié.es titulaires embarquant intérimaires et précaires et les oubliant au moment de recueillir les gains du rapport de force créé collectivement. Ou les Katangais, zonards et autre prétendus « voyous » de Mai 68 sacrifiés à la répression après la fin des occupations de facs.

La phase qui s’ouvre pour la Zad met sur le devant de la négociation celles et ceux qui ont des projets agricoles, économiques, activités qui ont toute raison de demeurer dans la zone à développer, suivant les héritages de ce mouvement de lutte. Dans un monde où une certaine valeur travail fonde la légitimité de bien des actes en société, il serait extrêmement dommageable que le mouvement contre l’aéroport et son monde oublie que ce n’est pas le seul critère pour exister et qu’un jugement de classe en arrive à disqualifier celles et ceux qui n’entrent pas dans ce cadre.

Un autre monde est possible. Si la ZAD est un bien commun des luttes, c’est uni.es, jusqu’au bout, que ça le restera.

La CNT Nantes et le CNCA