Secrétariat international de la CNT

Maroc : Le ras le bol des salariés de la SODEA et de la SOGETA

Publié le vendredi 29 août 2008

Ils étaient tous là ce matin du mercredi 27 août 2008. Ils sont venus par
centaines de tous les coins du Maroc pour manifester leur colère devant le siège de
la SODEA à Rabat.. Ce sont les ouvriers et les ouvrières des deux sociétés étatiques
(secteur agricole) : la SODEA (société de développement agricole) et la SOGETA
(société de gestion des terres agricoles)


Pourquoi ce ras le bol ?

1- un peu d'histoire :

- Au début du 20ème siècle, des colons (essentiellement
français) s'étaient emparés des terres les plus fertiles du Maroc. Expropriation
sans indemnité aucune. Ces terres étaient des propriétés collectives des tribus
locales. Les paysans expropriés devenaient ainsi de simples salariés. Ce fut
l'épopée du capitalisme agraire dans un pays monarchiste semi féodal.

- Au début des années soixante, au lendemain de " l'indépendance de 1956", la
superficie des terres héritées du colonialisme dépassait les 800 000 d'hectares.
Au début des années soixante dix, une grande partie de ces terres "a été passée"
dans des conditions louches à de gros bonnets marocains (militaires et civils). Les
membres de la famille royale étaient les premiers à se servir. On n'est jamais mieux
servi que par soi même !
L'Etat créa deux sociétés publiques pour la gestion du reste (quelques 400 000ha).

- Au cours des années qui suivent, le roi défunt Hassan II octroie gracieusement des
fermes publiques à des individus pour leur loyauté et leur asservissement. Le
docteur Alkhatib, le fondateur du PJD islamiste et Ismaïl Alaoui chef du PPS (exPc
marocain) font parti des bénéficiaires.

- Depuis quelques années, et dans le cadre de la politique de "privatisation" , le
reste des quelques milliers d'ha de terres publiques (de la SODEA et de SOGETA)
passent aux mains de nantis , "nationaux" et étrangers, militaires et civils. Des
individus qui n'ont rien à voir avec l'activité agraire se retrouvent avec des
centaines d'ha de ce qu'il y a de mieux comme terre cultivable..
Un jeune prince s'est vu octroyé quelques centaines d'ha.

2 - Quelques petites remarques :

- Ces terres, les plus fertiles du Maroc, devaient revenir au lendemain de
"l'indépendance" à leurs anciens propriétaires( les paysans organisés en tribus : la
terre était la propriété collective).

- Ceux du Palais les cadres militaires, les "hommes politiques" (Ahardane du MP,
Alkhatib du PJD, Radi de l'USFP, Ismaîl Alaoui du PPS et tant d'autres), les
"Hommes" de la culture, du sport...tout ce beau monde a eu sa part du grand gâteau.

- Aujourd'hui , comme leurs ancêtres, Les ouvriers et les ouvrières agricoles sont
les victimes de cette nouvelle "razzia". Les nouveaux maîtres des terres de la SODEA
et de la SOGETA, ont transformé ces travailleurs en véritables serfs moyenâgeux :
ils triment, elles triment sans acquis aucun, et cela malgré les clauses du fameux
"cahier de charges". Les nouveaux maîtres, véritables vampires, ont augmenté le
rythme de la "suce " (Pardon Mr Molière pour ce mot qui n'existe pas dans votre
langue !), multiplié le taux de plus-value.

- Hier, le syndicalisme était banni dans le secteur agricole, les grands
propriétaires terriens ne payaient pas d'impôts (aujourd'hui aussi,alors que leurs
salariés en paient). C'était la volonté de Hassan II, le premier grand propriétaire
terrien du Maroc. Pas de sécurité sociale, pas d'allocations familiales, pas de
prestations sociales, pas de retraite...C'était l'esclavagisme déguisé.
Une poignée de militants (à leur tête Abdelhamid Amine), a relevé le défi. Ces militants se sont lancés dans une aventure de haut
risque. En quelques années ils ont pu bâtir le syndicat agricole le plus puissant du
pays. Le syndicat le plus combatif. Des propriétaires terriens députés, politiques,
militaires se sont dressés devant eux. Les forces de répression engagent des
campagnes d'arrestations (et d'intimidation) des ouvriers et ouvrières agricoles
syndiqués...
Aujourd'hui, et malgré la précarité de leur situation, ces forces laborieuses ont
retrouvé une partie de leur dignité : il fallait les voir le mercredi 27 août 2008,
en plein cœur de Rabat, dans un quartier relativement bourgeois scander avec fierté
des slogans qui reflétaient leur colère et surtout leur détermination à lutter pour
arracher leurs droits.

Bravo aux militants qui ont tout fait pour redonner à ces milliers de travailleurs
de l'espoir !

Bravo à Amine, Khadija Ghamiri, Handouf, Hakch, Lahnaoui, Tahar Douraïdi, à Samira
Raïs, à Saïd Khaïr Allah et à l'infatigable Khadija Nitassi et aux centaines
d'autres syndicalistes dévoués à la cause des travailleurs agricoles !

Mohammedia, le 27/08/2008
Ali Fkir

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