Secrétariat international de la CNT

Bolivie : une semaine de grève générale de la COB

Publié le dimanche 17 avril 2011

La Centrale ouvrière bolivienne a débuté le 6 avril une grève générale illimitée avec des mobilisations menées par des instituteurs, des mineurs, des ouvriers et des travailleurs de la santé. La grève a été lancée après que la police de La Paz a réprimé avec des lacrymogènes et plusieurs arrestations les colonnes de mineurs qui voulaient se rendre sur la Place Murillo, devant la maison du gouvernement. Même si la grève générale est très limitée, elle a eu un écho national grâce aux grandes mobilisations de 10 000 travailleurs à La Paz et des mobilisations dans d'autres villes qui se répètent tous les jours. La revendication est celle d'une augmentation salariale supérieure au 10 % qu'a décrété le gouvernement pour une partie seulement des travailleurs de l'État (santé, instituteurs, policiers et militaires) et a dit qu'il s'agissait d'un « guide » pour la discussion salariale dans le secteur privé. Mais les aliments ont augmenté de plus de 30 % en moyenne sur les derniers mois. Une autre demande concerne la dérogation au décret suprême 21060, datant des temps du néolibéralisme, qui garantit la « liberté des contrats », rend possible la tertiarisation du travail et empêche le contrôle des prix. Evo Morales refusait de recevoir les grévistes, mais entre dimanche et lundi il s'est réuni seize heures durant avec la délégation de la COB. Il a cependant refusé une augmentation salariale supérieure à 10 %. Comme les gouvernements néolibéraux, il allègue qu'une augmentation salariale de 15 % « provoquerait de l'hyperinflation ». Sans prendre en considération la hausse des prix, des aliments en particulier, qui existait bien avant, sans qu'il n'y ait eu aucune augmentation salariale, et que cela ait amené des millions de boliviens au bord de la famine.

La COB, dans sa « contre-proposition », a réclamé 15 % (avant qu’elle n'ait précisé combien elle réclamait, seuls les ouvriers parlaient de 30 %, les 15 % que réclame maintenant la COB n'ont été discutés dans aucune base syndicale).

Les autres secteurs sociaux non salariés ou informels ne participent pas à la grève générale. La direction de la COB n'a porté ni les demandes des paysans ni les demandes populaires. Cependant il y a des exemples de soutien, comme une rencontre d'ayllus indigène (organisation traditionnelle), le Mouvement sans terre et des représentants de la FEJUVE (Federación de Juntas Vecinales, fédération des comités de quartier) d'El Alto, qui se sont réunis à Cochabamba et se sont solidarisés avec les grévistes. La direction bureaucratique de la COB, emmenée par le mineur Pedro Montes, a reporté le congrès de la centrale depuis deux ans et est arrivée pour aider le gouvernement. Elle s'est vue obligée de lancer la lutte à cause de la pression des bases sur le thème des salaires et ensuite la grève générale à cause de la répression.

Le gouvernement a déclaré la grève illégale et a menacé de retenues salariales et de mises à pied des grévistes, et a également menacé de réprimer ceux qui bloquent les rues et les routes. Il tente aussi de mobiliser les secteurs paysans contre la grève, avec les directions syndicales qu'il contrôle, c’est à dire la CSUTCB (une centrale paysanne) et les Bartolinas (femmes paysannes) même si jusqu'à maintenant il n'y a pas réussi. Il y a beaucoup d'indices de ce qu'une grande partie de la paysannerie est aussi profondément mécontente de la marche de l'économie. Des récents sondages indiquent qu'Evo Morales obtient seulement 33 % d'opinions favorables. La détérioration du gouvernement est notoire depuis décembre dernier quand il a décrété une augmentation de l'essence de 85 %. Ce décret a provoqué une gigantesque réaction populaire, avec des mobilisations et des blocages qui menaçaient de renverser le gouvernement. « Ou il retire le décret ou il s'en va », se on disait dans les rues. Le 31 décembre le gouvernement a annulé le décret. Mais cela a eu pour effet de générer également une grande instabilité des prix, une augmentation des aliments, qui existait déjà mais qui s'est accélérée depuis. Des millions de personnes ont compris que le gouvernement d'Evo n'était pas le « gouvernement des paysans » ou « des mouvements sociaux », comme il s'auto-proclame, mais un gouvernement subordonné aux capitalistes, aux transnationales et des propriétaires fonciers. Malgré les discours, Evo n'a pas touché à la grande propriété terrienne et les hydrocarbures sont toujours dans les mains des transnationales. Le décret sur la hausse de l'essence s'est faite sur une demande expresse de la Chambre bolivienne des hydrocarbures (qui n'a rien de bolivienne mais qui est l'émanation des transnationales Petrobrás, Repsol et d'autres).

Le peuple bolivien commence de nouveau à réclamer les solutions de fond qui ont motivé la « Guerre du gaz » en 2003, l’Agenda d'octobre 2003, l'expropriation et l'expulsion des transnationales, l'industrialisation des hydrocarbures et des minéraux dans le pays, la confiscation des propriétés terriennes et leur remise aux paysans et indigènes sous forme de propriété collective. La grève de la COB est à un carrefour dangereux. Le gouvernement tente de la diviser. La direction vient de refuser de convoquer à un élargissement ouvert aux bases et n'a pas non plus convoqué les autres secteurs populaires. De cette manière elle facilite les manœuvres du gouvernement. La Protesta vient d'impulser le soutien à la lutte des travailleurs de la COB, mais en avertissant que le gouvernement voulait les diviser et les mettre en déroute. Un élargissement national avec des délégués de tous les secteurs choisis par la base qui élabore un cahier de doléances ouvrières, populaire, paysanne et indigène est nécessaire. Chaque peuple indigène, chaque région du pays, chaque quartier populaire - le peuple d'El Alto ou celui de Potosí - ont des demandes propres totalement légitimes, toutes doivent être reconnues dans un cahier unique qui accompagne la pétition salariale pour réussir une mobilisation unie et radicale qui impulse un programme économique au service des majorités populaires.

Source : http://www.laclase.info/internacion...

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