Secrétariat international de la CNT

À Thessalonique, la police attaque les militants antifascistes

Publié le lundi 26 octobre 2020

Le 16 septembre 2020, la police de Thessalonique (Grèce) est intervenue violemment sur des activistes lors d’une intervention de nettoyage des murs du centre-ville couverts d’inscriptions fascistes posées quelques jours auparavant par des groupes néonazis locaux poches d’Aube dorée. Les militants ont fait l’objet d’interpellations musclées et de maintiens en garde à vue, dans des conditions indignes.

local/cache-vignettes/L225xH300/thumbnail-2-c13b4.jpg?1603696294

« Les nazis n’ont pas de place dans la ville ». Pour les antifascistes de Thessalonique, le message est clair… Pour la police, il l’est moins… C’est pourquoi, le mercredi 16 septembre dernier, les forces de police sont intervenues aussi brutalement sur les militants antifascistes de la ville grecque. Ces derniers menaient une action de nettoyage et de recouvrement d’inscriptions fascistes apparues depuis peu autour du monument de la Tour blanche, dans le quartier central de Nea Paralia. Les graffitis et des croix gammées étaient l’œuvre de membres de « Grecs pour la patrie », nouveau parti politique fondé par Ilias Kassidiaris (ex-membre et porte-parole du parti d’Aube Dorée) et d’autres groupes néonazis locaux. Ceci, à quelques jours de la manifestation annuelle en mémoire à Pavlos Fyssas, assassiné en 2013 à Athènes par Aube Dorée, jugée pour ce crime très récemment.
L’attaque de la police a eu lieu de nuit, vers 22h, alors que les antifascistes cherchaient à retirer ou à couvrir les inscriptions nazies : 51 personnes ont été interpellées et gardées à vue de deux à quatre jours dans les locaux de la Préfecture de la police, privées d’eau, de nourriture et d’accès aux toilettes avant d’être présentées devant le procureur et l’enquêteur social où une série d’accusations mensongères ont été formulées. Les antifascistes ont ainsi été accusés de désobéissance pour avoir refusé de donner leurs empreintes digitales et leurs photos ; d’atteinte à l’ordre public ; de violences contre les forces de l’ordre alors que la police est à l’origine de l’attaque ; de détention illégale d’armes pour les drapeaux et les casques de moto en possession de certains d’entre eux et d’usure partielle du monument artistique.

La municipalité oublie d’effacer les slogans nazis
Selon les militants présents sur place, aucun slogan antifasciste n’a pourtant été écrit sur le monument. Toutefois, la Justice et l’État grecs semblent considérer les slogans antifascistes comme des actions de vandalisme et ceux des nazis comme des décorations artistiques… Pour preuve, le lendemain, alors que les agents de propreté de la mairie sont très facilement parvenus à effacer les slogans antifas, les croix gammées des fascistes restées présentes dans le quartier ont été « oubliées ».
De plus, à la dernière minute du procès et sans notification préalable, le procureur a formulé une charge supplémentaire pour « destruction de monument historique et protection des antiquités » pour les inscriptions antifascistes autour de la Tour blanche. Cette accusation clairement fabriquée a été aussi supportée par le curateur des antiquités qui, en 2008 a accordé la construction de bancs dans l’espace historique du monument, entraînant sa destruction partielle. Le projet figurait, à l’époque, dans le plan de rénovation urbaine de l’ex maire Vasilis Papageorgopolos, membre de la Nouvelle Démocratie et libéré de prison après une accusation de détournement de 30.000.000 euros des fonds municipaux. Une dernière accusation qui a ainsi obligé les militants à passer deux jours de plus en garde à vue et à se voir assujettis à des limites restrictives ainsi qu’à un pointage mensuel au commissariat.

L’État nargue le mouvement antifasciste
Pour les militants grecs, cette attaque est considérée comme une véritable provocation du gouvernement envers le mouvement antifasciste, quelques jours avant l’anniversaire de l’assassinat de Pavlos Fyssas et au début du procès d’Aube dorée.La justice a condamné le parti nazi et cela constitue une victoire historique pour le mouvement antifasciste. Mais pour autant, alors que la Cour rendait son verdict le 7 octobre 2020, les forces de l’ordre ont chargé les manifestants, venus massivement (environ 10 000 personnes) devant le tribunal contre le nazisme et Aube dorée. A maintes occasions, en effet, certains membres du parti gouvernemental grec de la Nouvelle Démocratie (ND) ont exprimé leur désir de collaborer avec une « Aube dorée plus sérieuse » (déclaration de Viron Polydoras, ex ministre de la Justice et de l’Ordre public), désormais qualifiée d’organisation criminelle…

La crise économique a favorisé la montée du fascisme
Il y quelques années, la crise économique qui a frappé la Grèce a permis la réapparition des nazis dans la scène publique. Une apparition soutenue par le parti de la Nouvelle démocratie, au pouvoir à l’époque, pour oppresser les mouvements sociaux. La Grèce a vécu des pogroms d’Aube Dorée contre les migrants, les homosexuels, les salariés et les grévistes avec souvent la tolérance et parfois la collaboration de la police. Utilisés par le capital, les fascistes ont pu attaquer la base sociale en lutte et la classe ouvrière militante.
Les antifascistes n’oublient pas la phrase célèbre de Horkhaimer : « Celui qui ne veut pas parler du capitalisme doit se taire à propos du fascisme.» Ainsi, de son apparition jusqu’à nos jours, le nazisme demeure la réserve la plus réactionnaire du capitalisme et sa plus violente expression.
C’est pourquoi, les antifascistes n’attendent rien d’une « démocratie » qui condamne 51 antifascistes pour avoir effacé des svastikas en laissant sans punition leurs auteurs, qui brûlent les squats et les espaces sociaux.

L’antifascisme, une lutte au quotidien
Malgré les tentatives de l’État grec pour opprimer le mouvement antifasciste, les manifestations de début octobre 2020 et la grande vague de solidarité pour les 51 militants de Thessalonique ont envoyé un message fort aux nazis, restés libres et au gouvernement. La solidarité, et surtout la solidarité internationale a été toujours l’arme le plus forte dans la lutte contre le nazisme.
En Grèce, la lutte contre le fascisme est une lutte quotidienne, qui se pratique dans les rues, dans les écoles, dans les espaces de travail et dans les quartiers. En effet, lutter contre le fascisme est la responsabilité de tous pour pouvoir assurer l'émancipation de notre classe contre les méfaits du capital.

Texte rédigé par Eleni C. membre de l’Initiative libertaire de Thessalonique et de la FA grecque, remis en forme par Sandrine Y.

février 2024 :

Rien pour ce mois

janvier 2024 | mars 2024

S'abonner à notre lettre d'information :