Le printemps des luttes, c’est aujourd’hui !

               Ce texte a été écrit par les Camille du groupe « revendications » constitué à la suite de l’assemblée générale (AG) interfac rassemblée vendredi 8 février 2019 et comportant des étudiant.e.s et lycéen.ne.s de divers établissements de la région parisienne. Cette AG a été organisée par plusieurs associations étudiantes parisiennes écologistes en vue de lancer le mouvement de grève pour l’environnement de la jeunesse reconduite chaque vendredi à partir du 15 février.

Le 12 février 2019, Reporterre publiait leur manifeste pour le climat et leur premier ultimatum : déclarer l’état d’urgence écologique et sociale afin de débloquer un plan interministériel à la hauteur des risques encourus. Leur deuxième ultimatum, concernait l’énergie et le troisième, ci-dessous, l’alimentation.

Pour ce vendredi 1er mars, en plein Salon de l’agriculture, nous proposons au gouvernement de travailler sur les questions d’alimentation et d’agriculture.

Le système capitaliste mondialisé s’est emparé des principales filières de production agroalimentaire, ainsi que de la commercialisation des semences, l’acheminement, le conditionnement et la distribution des denrées, afin de les rendre profitables. Résultat : aujourd’hui, alors que 2,4 milliards de personnes dans le monde sont en situation de surconsommation alimentaire et en proie à son lot de maladies cardiovasculaires, plus de 820 millions souffrent de sous-nutrition [1]. Les agriculteur.trice.s, soumis.e.s aux fluctuations spéculatives des cours des marchés, aux pressions de la grande distribution et aux lobbies agricoles imposant leur modèle de monoculture intensive, se retrouvent souvent en situation précaire.

Les logiques implacables des marchés financiers mènent à d’absurdes situations de surproduction ou d’importations lointaines, tandis que la biodiversité s’effondre à cause de la surpêche et de techniques agricoles destructrices (intrants chimiques, monoculture, pesticides, travail du sol trop fréquent, suppression des bocages, haies et mares), que les sols s’érodent et s’appauvrissent, épuisés. La production agroalimentaire est « le principal facteur de dégradation de l’environnement et de transgression des limites planétaires », représentant environ 30 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, et 70 % de la consommation d’eau douce [2]. L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a très récemment averti : « La biodiversité, qui sous-tend nos systèmes alimentaires, à tous les niveaux, est en déclin dans le monde. Une fois perdues, les espèces de plantes, d’animaux et de micro-organismes qui sont critiques pour nos systèmes alimentaires ne peuvent être récupérées. L’avenir de notre alimentation est donc gravement menacé. » Presque partout, c’est l’exploitation grossière du vivant par la force brute qui prévaut, méconnaissant les dynamiques complexes des écosystèmes.

Réduire drastiquement le gaspillage alimentaire 
Face à cet accablant constat, l’État devra cette semaine prendre trois mesures fortes pour changer radicalement l’orientation de la politique agricole.

Tout d’abord, nous appelons le gouvernement à permettre à tou.te.s d’adopter une alimentation non carnée, issue de l’agroécologie, éthique et produite à moins de 100 kilomètres de leur domicile, et à l’encourager fortement. Pour cela, il sera notamment nécessaire de dégager des subventions d’aide à la conversion, de repenser localement les marchés agricoles et de prévenir les dérives spéculatives, de limiter la production de viande et de poisson (extrêmement coûteuse en ressources naturelles), de réglementer les taux de marge ainsi que la taille des groupes de distribution, mais aussi de limiter la taille des fermes pour réduire l’accaparement agricole et la désertification rurale. Une attention toute particulière sera portée sur l’interdiction immédiate des pesticides chimiques et la limitation raisonnée de l’emploi des pesticides naturels.

Deuxièmement, le gouvernement devra prendre les décisions qui s’imposent pour préserver les terres agricoles. Tous les grands projets inutiles tels qu’EuropaCity et tous les aménagements nécessitant le bétonnage, l’imperméabilisation ou l’artificialisation des terres seront interrompus sur-le-champ, en même temps qu’un vaste plan de « débétonnage » et de revégétalisation sera initié.

Enfin, l’État aura pour tâche de réduire drastiquement le gaspillage alimentaire : selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), 18 % de la production alimentaire destinée à la consommation humaine serait gaspillée ; toute la nourriture jetée en Europe chaque année permettrait de nourrir l’équivalent d’un milliard de personnes [3]. Pour cela, le renforcement des réseaux de redistribution gratuite des produits invendus ou ayant une date limite de consommation proche constitue un préalable indispensable. Il faudra également assouplir, voire annuler, les normes de calibrage des fruits et légumes et minimiser le trajet de transport des denrées.

Si le gouvernement persiste dans son manque de volonté et maintient ses notes aussi proches de 0, un conseil de discipline sera organisé pour envisager une réorientation. Face à la catastrophe, cet enseignement est celui de notre futur, l’échec n’est donc pas une option. Nous saurons vous le rappeler incessamment.
Nous donnons rendez-vous à tous les grévistes, ce vendredi 1er mars à 13 heures place Saint Michel pour le troisième rendu des copies.

P-S    Vu sur Reporterre