La CNT soutient le mouvement social martiniquais. Ainsi que toutes les formes de luttes qui s’y organisent contre la vie chère, contre le capitalisme, contre le colonialisme français et sa police. Nous réaffirmons notre soutien total au prolétaires et au peuple de Martinique en lutte pour leur dignité et leur accès aux ressources les plus élémentaires.

Depuis le 1er septembre, un mouvement social déterminé s’est construit contre l’inflation et la vie chère, faisant écho aux mouvements de 2021 ou 2009, tout aussi massifs, qui partageaient beaucoup de ses revendications. Le protocole signé le 16 octobre pour calmer les manifestant·e·s ne paraît pas satisfaisant et beaucoup appellent à continuer le mouvement. Il ne s’agit que d’engagements verbaux de l’État français et de ses partenaires, sans arrêté, décret ou décision impérative. Une grande liberté et une grande confiance sont accordées aux capitalistes locaux dans l’application de ces décisions avec comme seul obligation de "rendre des comptes" en envoyant des relevés de prix aux services de l’État deux fois par an. Même en ne s’attendant à rien, on ne peut s’empêcher d’être déçu·e·s.

Contre la vie chère

Environ 400 000 personnes vivent en Martinique, région la plus âgée de l’empire français, où la vie est 40% plus chère et les salaires plus bas qu’en métropole. Le taux de chômage y est également deux fois plus élevé. Il atteint jusqu’à 60% pour les moins de 25 ans.
Mais qui donc fait son beurre sur la misère des martiniquais·e·s ?

L’économie locale est en grande partie contrôlée par les békés, c’est à dire les descendant·e·s des colons, notamment dans le domaine agricole (canne à sucre, rhum et bananes). Même si l’importance de l’agriculture dans l’économie martiniquaise est moins importante d’année en année, elle marque l’histoire de l’île puisque pendant des décennies, les propriétaires agricoles ont empoisonné les terres, l’eau et la population avec des litres de chlordécone.
Aujourd’hui, la principale source de revenus de l’île est le tourisme. Là encore, la plupart des infrastructures, terres et hôtels sont la propriété des familles de béké.

Comme acteur central dans l’organisation de la misère martiniquaise, on retrouve donc sans surprise une dynastie de béké : la famille Hayot. Ayant fait fortune grâce à l’esclavage et à la production de canne à sucre, l’État français les a rincé en 1849 en leur donnant beaucoup d’argent en guise de compensation, un an après l’abolition de l’esclavage.
Bernard Hayot fonde le groupe du même nom (GBH) dans les années 60 et ouvre des entreprises dans les Antilles (distribution alimentaire, vente d’automobiles, production d’alcool). Aujourd’hui, le groupe GBH est le premier employeur privé de la Martinique.
Dans une situation de quasi monopole quant à l’import et à la distribution de produits alimentaires, le groupe en profite pour augmenter grassement ses marges et apparaît en grande partie responsable de la vie chère en Martinique mais aussi plus globalement dans les territoires colonisés par l’empire français (le groupe est également implanté à la Réunion, en Guadeloupe, en Guyane et en Kanaky).

Mais il n’y a pas que les capitalistes "locaux" qui tirent profit de l’exploitation de la Martinique et des martiniquais·e·s, il y a aussi des capitalistes métropolitains. Et comme la quasi totalité des échanges commerciaux passent par voie portuaire, il nous faut parler de la CGA-CGM : vendeurs d’armes (sous-marins de la CMN), propriétaires de médias (La Provence, BFM, RFM), transporteurs maritimes et terrestres, cette compagnie contrôle le commerce maritime et prend sa commission sur toutes les marchandises qui circulent vers ou depuis la Martinique.
Propriété de la famille Saadé, le groupe marseillais (premier employeur privé de la ville) est déjà connu des militants anti-impérialistes pour sa vente de navires de guerre à l’Arabie Saoudite, lesquels sont utilisés au Yémen dans le cadre du blocus meurtrier qui cause des famines à répétition depuis 2015.

Contre la répression coloniale

Si, en tant que militants ouvriers, on a souvent à faire à la violence décomplexée de l’État français et de sa police, elle est encore pire à la Martinique, et s’inscrit clairement et directement dans la manière dont l’État français réprime les prolétaires colonisés.
Les camarades y dénoncent une violence arbitraire et disproportionnée, avec des CRS particulièrement violents et zélés. Le départ de la CRS8 de l’île est devenu, début Octobre, l’une des revendications du front commun.

L’histoire n’est pas neuve et les ancien·ne·s racontent encore la revendication populaire de retrait des CRS de l’île, en décembre 1959, quand trois jours de manifestations antiracistes avaient effrayé l’ordre colonial et que trois jeunes ont été assassinés par la police, le plus jeune avait 15 ans.
L’histoire ouvrière n’a pas oublié non plus la grève des ouvrier·e·s agricoles de 1961, qui s’est conclue dans le sang. Au cours de la tristement célèbre "fusillade du Lamentin", la police a tiré sans sommation sur la foule et tué 3 manifestant·e·s.
Treize ans plus tard, en février 1974, une nouvelle grève des ouvrier·e·s agricoles se termine par 2 assassinats policiers.

Milice coloniale, milice du capital, la défiance est plus que légitime et nous exigeons, nous aussi, le départ des CRS de l’île.

Solidarité anticapitaliste et anticoloniale

La Confédération nationale du travail


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