Était-ce bien un premier mai ?

> Retour sur la manifestation du 1er mai à Bordeaux

 

Notre syndicat appelait ce 1er mai 2019 à manifester dans un cortège mélangé, côte à côte avec les gilets jaunes. Il faut dire que beaucoup d’entre nous manifestent chaque samedi depuis plusieurs mois. Il n’était donc pas question de participer au traditionnel « carnaval syndical » alors qu’une importante lutte sociale est en cours.

Rassemblé·e·s devant le TGI de Bordeaux en début de matinée, nous avons constaté que des policiers en civils (motards) contrôlaient « préventivement » à quelques mètres de nous. Ils fouillaient et confisquaient lunettes et masques à toutes celles et ceux qui souhaitaient rejoindre la manifestation.

Alors qu’une personne a tenté d’échapper à un de ces contrôles, elle s’est trouvée poursuivie puis interpellée à quelques mètres de notre cortège. Des policiers surgissant  de toute part ont formé un cordon et nous ont mis en joue avec des LBD et des Tasers. L’un de nos drapeaux à été rapté par un policier prétextant « que le manche n’était pas conforme ».

Dans la soirée les médias annoncent que 15 000 « contrôles préventifs » ont été réalisés en France.

 


« Un premier mai sans Flicaille, ce n’est pas un premier mai »¹


 

Le cortège s’élance enfin. Nous nous trouvons en tête, au sein d’un immense cortège « mélangé » qui devance celui de la CGT (qui veut toujours imposer d’être en pôle position).

Le « Triangle d’Or », quartier bourgeois de Bordeaux est soigneusement gardé par les « forces de l’ordre » comme chaque samedi. Contrairement au cortège syndical, les gilets jaunes n’ont pas peur d’approcher le quartier « bouclé ».

 


« Charogne !
Quand nous t’aurons supprimé,
Nous fêterons sans vergogne,
Bourgeois, notre premier mai ! »¹


 

Finalement les « grand chefs » de la CGT amèneront la manifestation dans une autre direction. La manif ne se divise pas mais repart en ordre dispersé. Les cortèges syndicaux sont explosés, le camion de l’Union Départementale CGT, après avoir tenté de reprendre la tête de la manifestation, se retrouve complètement débordé et noyé au sein d’une immense foule, principalement composée de gilets jaunes.

Les manifestant·e·s de sont pas avares de critiques contre les centrales syndicales. Partout ça râle contre les bureaucrates et les permanents syndicaux. Contre celles et ceux qui ne se lèvent plus depuis longtemps pour aller au turbin et qui pourtant prétendent défendre les intérêts des travailleurs/ses.

 


« Un premier mai sans colère ce n’est pas un premier mai »¹


 

Cette colère ne tardera pas à s’illustrer, au moment même ou le cortège va se scinder. Alors que les gilets jaunes étaient déjà engagés cours Victor Hugo, le Service d’ordre de la CGT tentera de dévier la manifestation vers la place de la Victoire, mais sans succès. Des milliers de manifestant·e·s préféreront suivre les gilets jaunes, conspuant au passage la stratégie de la CGT.

 

Photo Geogres GOBET (AFP)

 

Pour la CNT, le choix était évident, notre place est avec celles et ceux qui luttent. Les bureaucraties syndicales nous détestent et de toute façon nous ne les considérons pas comme des alliées de la classe ouvrière.

La secrétaire départementale de la CGT, Corinne Versigny, nous inspirera cette petite chanson :

« On est là, on est là, Même si Versigny veut pas, nous on est là

Pour l’honneur des travailleurs et pour un monde meilleur

Même si Versigny veut pas, nous on est là »

Évidemment des militant·e·s de syndicats CGT et Solidaires ont cependant choisi de suivre les gilets jaunes plutôt que les leaders syndicaux.

 


« Un premier mai sans révolte ce n’est pas un premier mai »¹


 

Au niveau de la Porte de Bourgogne, un important dispositif de forces de l’ordre et un canon à eau impose à la manifestation de prendre la direction de la gare par les quais. En passant devant l’imposante bâtisse du syndicat Force Ouvrière, les noms d’oiseaux volent une nouvelle fois. Après être passé place de la Victoire, le cortège traversera la fête de la CGT, devant la Bourse du Travail. Nouveaux noms d’oiseaux. Le sentiment de dégoût à l’égard du syndicalisme réformiste s’exprime.

La manifestation se terminera par une nasse sur les boulevards avec des contrôles d’identité pour tout le monde (avec nouvelles confiscations de lunettes et de masques) avant de se reformer place de la Bourse à 14H30. Le cortège repartira en centre ville suivi par des dizaines de camions de forces de l’ordre et des voltigeurs. C’est place Saint Michel que la charge sera la plus violente, avec usage répété de grenades de désencerclement, de lacrymogènes, de tirs de LBD. Un Street-Medic finira au sol. Nous apprendrons plus tard qu’il y a également eu une charge place Camille Julian.

Le pouvoir continue dans sa logique répressive face à celles et ceux qui réclament la justice sociale. Nous dénonçons ces tentatives d’intimidation, les interdictions de manifester, les lois anti-casseurs, les stratégies de « maintien de l’ordre » qui visent à tuer la contestation.

Et ce 1er mai nous a encore démontré que nous n’avions rien à attendre des directions syndicales, qu’il faut réanimer l’essence révolutionnaire du syndicalisme en renouant avec la lutte et en se débarrassant de la bourgeoisie syndicale. La lutte continue !

 


¹ Les extraits cité ci-dessus sont tirés d’une chanson de Gaston Couté : La chanson du 1er mai (1911)

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