Le secret de l’amulette, Edith Nesbit

En ces temps électoraux, allons rechercher le livre cité par Alison Lurie dans son très intéressant et plutôt subversif essai sur la littérature de jeunesse. En effet, on peut lire dans Ne le dîtes pas aux grands, Rivages poches/Bibliothèque étrangère (p.146) un passage du roman de Nesbit (membre de la Fabian Society) dans lequel le droit de vote est qualifié de « jouet » qui empêche les travailleurs de se révolter.

« La reine de Babylone visite avec les enfants héros du roman le Londres édouardien ; elle est choquée par les conditions de vie des habitants.
– Mais comme vous traitez mal vos esclaves ! dit-elle Quels pauvres diables, misérables et délaissés ! (…)
– Ce ne sont pas des esclaves mais des travailleurs, dit Jane.
– Bien entendu ! les esclaves doivent être travailleurs, cela va de soi. ce n’est pas à moi qu’il faut le dire. Vous croyez que je ne sais pas ce que c’est qu’un esclave ? pourquoi leurs maîtres ne veillent-ils pas à ce qu’ils soient mieux nourris et mieux vêtus ? Atendez-vous à une révolte si vous continuez comme cela, reprit la reine.
– Oh non, dit Cyril, ils ont le droit de vote, vous comprenez, ça les empêche de se révolter. Ça fait toute la différence. C’est papa qui me l’a dit.
– Le droit de vote ? demanda la reine. C’est quoi ? Un talisman ? Un objet magique ? Qu’est-ce qu’ils en font ?
– Je ne sais pas, répondit Cyril, harcelé par toutes ces questions. C’est juste le droit de vote. ils n’en font rien de spécial.
– Je vois, dit la reine. C’est une sorte de jouet. »

Le secret de l’amulette, Edith Nesbit, Gallimard jeunesse,1997.