Crise sanitaire : une colère impossible à mesurer

Ecoles fermées, collèges fortement mobilisés  profs des lycées, lycén.nes et vie scolaire aux rendez-vous à Paris ou en régions, la grève nationale du 10 novembre a été l’expression d’une colère qu’aucune statistique en pourcentages de grévistes ne pourra contenir.

De Lille à Marseille, le même constat : « la crise sanitaire a révélé les insuffisances structurelles de l’école publique : locaux inadaptés, moyens humains insuffisants. ».

Tracts, affiches, mots dits, un résumé identique :

« Depuis mars, rien n’a été vraiment préparé ou organisé. Rien n’a été vraiment engagé pour anticiper la reprise de l’épidémie : pas de recrutement de personnels afin d’alléger les effectifs des groupes classes ;  pas d’embauche de personnels de toutes catégories à la hauteur des besoins : agents d’entretien, AED, AESH, médecins et infirmiers scolaires, assistantes sociales ; aucun travaux d’aménagements des locaux… »

Ne pas fermer les écoles, collèges et lycées

Une certitude partagée : ne pas revivre l’école à distance : qui n’est plus l’école.

Et une violence insupportable contre les lycéen.nes. Frappé.es,  gazé.es, plaqué.es, interpellé.es, depuis le 3 novembre, à Paris, Nantes, Saint-Denis…, les violences policières contre les blocus lycéens se sont multipliées. A lire ci-dessous, le communiqué des syndicats du 93.

A lire aussi :

– A propos des élèves de 10 ans emmenés au commissariat :

https://blogs.mediapart.fr/georges-gumpel/blog/111120/propos-de-l-arrestation-des-quatre-jeunes-mineurs-albertville

et le texte de Laurence De Cock : https://blogs.mediapart.fr/laurence-de-cock/blog/081120/conjurer-la-peur-par-le-collectif

– La FCPE 93 écrit au président de la République

Communiqué de la FCPE93:

Lycées fermés : jeunesse sacrifiée – Lettre ouverte au président de la république


 Monsieur le Président,
 
Alors que vous avez convoqué un conseil de défense sanitaire demain pour statuer entre autres sur la fermeture des lycées, la fédération des parents d’élèves de Seine-Saint-Denis vous demande instamment de les laisser ouverts.
 
Monsieur le président, toute la communauté éducative se bat depuis deux semaines pour trouver un protocole respectueux de la situation sanitaire mais aussi des besoins essentiels de nos citoyens de demain. Alors que les solutions se mettent en place, ne fermez pas les lycées.
 
Monsieur le président, rien ne remplace l’enseignement en présentiel. Toutes les études le prouvent, y compris celles lancées à la rentrée par le ministère de l’éducation nationale. Priver à nouveau les élèves d’un second trimestre consécutif de cours alors qu’ils sont déjà fragilisés par le premier confinement est assurer qu’un bon nombre d’entre eux ne raccrocheront jamais les wagons de l’école. Ne fermez pas les lycées.
 
Monsieur le président, dans notre département – et il est loin d’être le seul dans ce cas – ni les lycées, ni les familles, ni les enseignants ne sont correctement équipés pour de l’enseignement purement à distance, sans parler de la solution internet de la région Île-de-France. L’espace numérique de travail est tombé plusieurs fois en début de semaine alors que les lycées n’étaient qu’en phase de test. L’enseignement à distance, c’est l’absence d’enseignement pour beaucoup d’élèves. Ne fermez pas les lycées.
 
Monsieur le président, l’école de la république ne forme pas seulement les élèves, elle les accueille dans un milieu protecteur ou s’apprennent les valeurs citoyennes de liberté, de fraternité et d’égalité. Elle est un produit de première nécessité pas seulement pour ces élèves citoyens en devenir mais pour nous tous.

Nos enfants sont l’avenir de tous. Les protéger, c’est nous protéger aussi.

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– Des collègues du primaire écrivent à leur inspectrice

A Paris, Le mardi 10 novembre 2020
Madame l’inspectrice,

Face à la crise sanitaire :

Nous ne voulons pas de fermeture des écoles.

Nous ne voulons pas du dédoublement des classes.

A l’école primaire, les élèves apprennent dans l’interaction et la socialisation. Apprendre, ce n’est pas seulement faire des exercices sous la surveillance d’un adulte. Ni le distanciel, ni les bricolages dans l’urgence évoqués par notre hiérarchie ne sauraient constituer une réelle « continuité pédagogique ».

C’est pourquoi, pour que l’école puisse continuer à accueillir les élèves en toute sécurité nous réclamons avant tout des moyens de protection :

– masques FFP2 pour tous les personnels (en particulier les personnels vulnérables)

– gel hydroalcoolique en quantité suffisante pour permettre plusieurs lavages de mains par jour des adultes comme des élèves

– lingettes et produits virucides pour nettoyer le matériel pédagogique et les surfaces de travail

– embauche d’un nombre suffisant d’ATE pour assurer le nettoyage tel qu’il est prévu dans le protocole et annoncé par le ministre.

Nous déplorons de devoir sans cesse réclamer ce matériel alors qu’il est du devoir de l’institution de protéger ses personnels et les élèves.

Il est évident que l’organisation pédagogique et sanitaire de l’école demande un véritable temps de concertation, autant entre enseignant.es, qu’avec l’équipe du périscolaire pour mettre en œuvre un protocole sanitaire cohérent.

Depuis huit mois que la crise sanitaire a commencé, nous ne comprenons pas que sa gestion se fasse systématiquement dans l’urgence et sans anticipation. Le ministre avait annoncé aux syndicats et dans les médias un temps de concertation préalable au retour des élèves pour les équipes : il nous a été retiré au dernier moment. Nous réclamons du temps, déchargé.es de classe, pour travailler en équipe.

A ce titre, le protocole sanitaire nous empêche de nous réunir en conseil des maîtres et maîtresses, nous avons besoin de matériel informatique et de connexions internet pour pouvoir travailler à distance. Une école ne fonctionne pas sans la coopération régulière
des enseignant.es.

Nous nous battons aujourd’hui pour que l’école puisse rester ouverte et garantir ses missions républicaines d’égalité, de liberté et de fraternité. Il faut que l’école soit accessible, plus que jamais, à toutes et tous, quelles que soient leurs conditions sociales d’existence. L’école de la République est gratuite : les masques nécessaires à la scolarisation de ses enfants doivent l’être aussi.

L’équipe pédagogique gréviste et non-gréviste  (PE, PVP, AESH)

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Lycéens arrêtés : halte à la répression policière des élèves du 93 !

5 novembre 2020

Mercredi 04 novembre, pour le troisième jour consécutif, des élèves du lycée général et technologique Paul Eluard de Saint-Denis (93200) ont bloqué l’entrée de l’établissement afin de protester contre l’indigence du protocole sanitaire mis en place à la rentrée des vacances d’automne.

Peu après 13h, alors que le blocus se déroulait dans une ambiance très calme, 5 élèves du lycée ont été violemment interpellés par la police nationale et placés en garde à vue. Des parents et deux représentant·es de la FCPE se sont immédiatement rendu·es au commissariat, mais dans un premier temps les policiers sur place ont refusé de leur permettre de communiquer avec les élèves.

Les policiers ont attribué un avocat commis d’office aux élèves à leur arrivée au commissariat, en refusant le droit aux familles de désigner leur avocat. Cependant, un avocat spécialisé dans les affaires de violences policières s’est ensuite saisi des dossiers. Tous les élèves ont été relâchés avant 21H. L’un d’entre eux avait été frappé au visage et ses lunettes étaient cassées. Il est accusé d’avoir frappé un policier quand il était à terre. La mère à qui la police a montré la vidéo incriminante affirme qu’il n’y avait rien qui justifie une telle accusation sur les images.

Par ailleurs, ce matin, les forces de police ont fait un usage immodéré de gaz lacrymogène contre des élèves du lycée d’Application de l’ENNA (Saint-Denis), qui elles et eux aussi bloquaient leur établissement pour exiger la mise en place d’un protocole sanitaire digne de ce nom.

Les organisations syndicales signataires dénoncent les violences et les intimidations policières exercées contre les élèves qui se mobilisent pour leur droit à apprendre dans des conditions sanitaires acceptables.

Organisations signataires : CNT 93, CGT Educ’Action 93, SNEP-FSU 93, SNES-FSU 93, SNUipp 93, SUD Education 93